Le plus inquiétant, c’est que la demande énergétique en Algérie pourrait doubler dès 2024, si la consommation de l’énergie continuait à progresser de 7%/an. Elle risque d’atteindre 100 millions de Tep à l’horizon 2030. Ce boom de la consommation d’énergie des ménages et transports influencera forcément sur les exportations. Et si, d’ici 2020, il n’y a pas de nouvelles découvertes, il y aura un déclin plus rapide des exportations de la production d’hydrocarbures conventionnels.
A cet effet, étant donné que l’Algérie n’arrive pas à diversifier son économie hors hydrocarbures, alors il est impératif pour l’Algérie de plaider pour un modèle de transition énergétique basé sur la diversification des sources d’énergies (renouvelables et/ou non conventionnelles) afin de diversifier ces sources de financement, pour sortir de l’économie rentière.
Croissance démographique, croissance économique & consommation d’énergie : ces trois axes structurent la problématique du développement « durable ». Le contexte énergétique national fait ressortir les constats suivants à savoir, une consommation énergétique interne, qui a atteint 56 millions de tonnes équivalent pétrole(TEP) en 2014, qui risque de doubler à l’horizon 2030 et la production totale d’énergie 2013 équivalent à 154 millions de Tep, dont 64% exportée et 36% consommée sur le marché intérieur (y compris pour la génération électrique).
Durant la décennie 2000-2012, les réserves de pétrole ont baissé de 8% et celles du gaz de 35%. La consommation nationale d’énergie a augmenté dans la même période de 80% pour le pétrole et 40% pour le gaz. La production totale des hydrocarbures a subi une baisse de 18% entre 2006 & 2012.
Ainsi, la consommation nationale (interne) d’énergie a eu une croissance substantielle de 2000 à 2014. Entre 2000 & 2005, cette consommation avait enregistré un taux de croissance moyen annuel de l’ordre de 5,68%, l’intensité énergétique a atteint 0,35 tonne équivalent pétrole, soit deux fois plus que celles des pays de l’OCDE (organisation de coopération et de développement économique).
En 2005, la consommation interne d’énergie était de l’ordre de 17 millions de tonnes équivalent pétrole(Tep) (pour 33 millions d’habitants), elle est passée à 53,3 millions de Tep en 2013 (pour 39 millions d’habitants). Elle a ainsi été multipliée par trois en l’espace de 8 ans.
L’économie nationale consomme le double d’énergie pour créer la même unité de valeur ajoutée (selon l’agence nationale APRUE). Par secteur d’activité, la structure de la consommation d’énergie, montre une prédominance du secteur des ménages & tertiaire, suivi des transports.
La consommation des ménages & tertiaires en produits énergétiques est passée de 30% en 2000, à 43% en 2013, celle des transports de 30% à 36%, alors que la part de l’industrie est passée de 31% à 21% durant la même période.
Le taux de croissance annuel moyen pour les produits gazeux est de 7%, suivi de l’électricité de 6%, puis les produits pétroliers en troisième position de 5%.
A cet effet, on peut dire que l’âge industriel alimenté par les hydrocarbures conventionnels tire à sa fin, et les technologies basées sur le pétrole sont en déclin, d’où l’exigence de développement d’autres sources d’énergies alternatives, en l’occurrence les énergies renouvelables et non conventionnelles, mais aussi les économies d’énergies et le changement du mode de consommation actuelle basé sur le pétrole.
Efficacité énergétique et réduction du gaspillage
Des questions d’importance sur les mutations à venir se posent à savoir, quel modèle de production & de consommation énergétique pour l’Algérie et quelle transition énergétique pour l’Algérie à l’horizon 2030?
Actuellement, la demande interne en énergie conventionnelle tourne autour de 50 millions de tonnes équivalent pétrole(Tep), elle devrait, selon les prévisions du ministère de l’énergie et si le rythme de consommation se poursuit, doubler à l’horizon 2030, voire tripler à l’horizon 2040.
A ce rythme, nos réserves d’hydrocarbures conventionnels vont diminuer sensiblement à court et moyen termes (scénario de laisser-faire). Les réserves d’hydrocarbures prouvées sont déjà consommées à plus de 50%, dont on peut rajouter celles dites probables et possibles, qui ne représentent que 20% environ des réserves prouvées restantes.
Ce modèle de consommation énergétique est insoutenable, nous allons tout droit vers une incapacité à maintenir un rythme d’exportation d’hydrocarbures conventionnels, susceptible de financer notre développement économique.
Ce qui inquiète aujourd’hui, c’est la tendance baissière de notre production et de nos exportations d’hydrocarbures conventionnels.
Et, de là, la question récurrente est celle de savoir comment l’Algérie va améliorer ses volumes de production en hydrocarbures conventionnels pour répondre à la demande nationale et, surtout, maintenir ses parts sur le marché international.
Plus grave encore, le programme d’action du gouvernement n’insiste pas beaucoup sur les économies d’énergies et sur l’efficacité énergétique qui doivent faire partie intégrante du mix-énergétique.
Dans ce cas, étant donné que la production de pétrole et de gaz conventionnel est en baisse en Algérie, faut-il continuer à le consommer ? Ou bien, réfléchir à des solutions alternatives ou de substitutions dans un futur proche.
Prioriser les différentes ressources à l’horizon 2030
Entre 2030 et 2040, l’Algérie n’a pas d’autres modèles énergétiques de transition que de basculer vers des énergies alternatives où les énergies renouvelables (solaire & éolienne) et les hydrocarbures non conventionnels (gaz & pétrole de schiste) seront une composante importante du mix-énergétique. Enfin, la problématique énergétique nationale nécessite une transition vers le mix énergétique et la maîtrise des technologies nouvelles (non conventionnelles et renouvelables) et de développer des systèmes productifs plus efficaces et moins énergivores.
L’Algérie a besoin d’un modèle de consommation énergétique de référence qui mette en place une stratégie nationale énergétique, sous forme de loi d’orientation sur la politique énergétique consacrant, la diversification, la rationalisation et l’efficacité énergétique.
Il important de rappeler que le mix énergétique sera défini par le déroulement d’un modèle de consommation énergétique. Ce modèle prendra en compte d’abord les objectifs de croissance économique, auxquels sera intégrée la croissance démographique. Ceci permettra d’évaluer les besoins de consommation énergétique pour trois principaux secteurs : le transport, l’industrie, le ménage & tertiaire.
Dans la définition du mix énergétique, partant de ces besoins, devront être examinées les différentes ressources d’énergies existantes, les réserves en place et les durées de vies restantes, la rentabilité économique de chaque ressource, la maîtrise technologique, la possibilité d’intégration et naturellement les impacts environnementaux de chacune devront être également évalués.
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Kamel Ait Chérif (L’Eco n°112, du 16 au 31 mai 2015)