Après des semaines d’attaques diverses contre les mesures adoptées par son département pour réguler un tant soit peu les importations qui saignent l’économie nationale, le ministre du Commerce, Amara Benyounes a choisi de rassurer son monde dans un entretien accordé à l’APS.
« L’assainissement du commerce extérieur n’est pas une guerre contre les importateurs » a-t-il déclaré en réaction à cette espèce de cabale médiatique qui le vise depuis que son équipe d’experts au ministère planche sur les voies et moyens d’en finir avec les pratiques de l’économie de bazar. Pourquoi le chef du MPA qui n’a pas l’habitude de mâcher ses mots a-t-il décidé de verser de l’eau dans son vin ? Tactique de communication ou recul face aux barrons du business ?
On pensera ce qu’on voudra du parcours politique de l’ex-cadre du RCD qui a choisi de rejoindre le pouvoir en place pour assumer des responsabilités ministérielles. Par contre, les dernières orientations fermes de son département depuis qu’il a pris les rênes du Commerce ne souffrent d’aucune ambigüité. On se décide enfin à prendre le taureau par les cornes, pour endiguer l’hémorragie de devises dont les réserves sont appelées à baisser dans un avenir proche en raison de la chute des cours du pétrole. Le dossier de l’importation dans l’automobile a prouvé qu’Amara Benyounes ne plaisantait pas.
Nouveau cahier des charges décrit comme draconien quand il énonce des exigences au profit de la sécurité des usagers de la route en plus de mécanismes anti-fraude fiscales, par exemple. La levée de boucliers ne s’est pas fait attendre. Pressions et intox par la presse-cliente des gros annonceurs que demeurent les concessionnaires étrangers qui comptent plus d’un ami dans les rédactions sensibles aux pages « quadrichromes » et aux cadeaux divers. Business is business !
Benyounes isolé ?
Malheureusement, sur ce chapitre, comme pour celui relatif à la vente des boissons alcoolisées, le gouvernement n’a pas paru très solidaire en alimentant implicitement les polémiques de mauvaise foi orchestrées par les lobbies des importateurs véreux. Car c’est bien d’eux et de leurs pratiques qu’il s’agit quand on parle d’assainir le secteur.
Au sujet des concessionnaires automobiles, nous publiions dans les colonnes du JI en 2008 une enquête relative aux malversations d’une société représentant une marque française, à travers laquelle nous révélions le stratagème élaboré pour organiser une évasion fiscale correspondant à de gros sous.
Notre article fut même suivi d’investigations diligentées par la DRS. On ne peut donc pas, aujourd’hui, passer sous silence l’isolement politique qui pourrait avoir motivé la mise au point du ministre du Commerce se voulant rassurant dans ses propos à l’APS.
De la puissance de l’Etat
Rassurer qui ? A première vue, l’objectif de diminuer la facture des importations devrait faire l’unanimité et il restera toujours un créneau honnête pour les importateurs sans que la République n’ait à s’excuser de réguler le marché. De simples lycéens à peine initiés aux sciences économiques savent que les pays les plus convaincus du libéralisme ont opté pour des solutions protectionnistes pour protéger leur souveraineté. Il n’y a pas de raison que l’Algérie s’interdise d’en faire autant.
Lorsqu’Amara Benyounes affirme que « nous ne pouvons plus continuer d’importer autant de voitures ou de ciment et quelques autres produits », quelqu’un peut-il rétorquer le contraire en défendant l’intérêt national ? De même pour la filière du médicament qu’il fallait absolument assainir par une nomenclature rigoureusement actualisée auprès du ministère de la Santé, ce qui a provoqué aussi quelques remous chez les parrains du milieu pharmaceutique…
Le ministre du commerce n’a donc pas d’autre mission que de rassurer l’ensemble des Algériens sur le travail de son département, en coordination avec les autres ministères, en faveur de l’économie nationale en ces moments incertains. Sinon, il aura menti en déclarant que « l’Etat est capable de combattre tous les lobbies quels qu’ils soient. Alors, tout le gouvernent avec Benyounes ?