Une «blacklist» de 24 produits interdits à l’importation, Des bateaux en rade et des conteneurs bloqués dans les ports

Une «blacklist» de 24 produits interdits à l’importation, Des bateaux en rade et des conteneurs bloqués dans les ports

Mayonnaise, moutarde, couches bébés, cosmétiques chinois, oranges, raisins, thons en conserves, batteries de voitures, chips… on en sait désormais un peu plus sur la liste noire des produits interdits à l’importation élaborée par le ministère du Commerce pour juguler la hausse du volume des importations.

La «blacklist» qui comporte au total 24 produits est réellement effective depuis le début du mois en cours même si les consommateurs algériens n’ont pas ressenti pour l’instant les effets de cette interdiction totale de l’importation de ces produits.

«Le ministère du Commerce a adressé une liste noire de 24 produits interdits totalement à l’importation aux inspections aux frontières. Il s’agit essentiellement de produits fabriqués ou cultivés localement comme les couches bébés, les oranges et les raisins ou considérés comme produits facultatifs et susceptibles d’être produits localement (chips, moutarde, mayonnaise).

Les répercussions de cette liste noire n’ont pas été ressenties par les consommateurs car les importateurs et les sociétés de distribution disposent de grands stocks, mais les dépôts devront se vider rapidement dans les prochaines semaines avec l’avènement du ramadan qui connaît une explosion de la consommation de certains de ces produits. L’application de cette liste noire n’a pas été communiquée à temps aux opérateurs économiques et nombreux importateurs ont été pris au dépourvu. Des conteneurs sont bloqués dans les ports et les services du commerce ont reçu des instructions fermes pour veiller au respect des mesures de restrictions», confie une source bien informée.

Cette «blacklist» a déjà coûté à un cadre de l’inspection du port d’Oran son poste. Il aurait été sanctionné pour avoir autorisé une cargaison d’oranges importées à quitter le port. Les grands perdants dans cette histoire sont toutefois les importateurs et les affréteurs. «Les sommes en jeu sont colossales et nombreux importateurs pourraient être ruinés dans les prochaines semaines», précise un connaisseur du créneau de l’importation.

Il ne s’agit plus du manque à gagner à cause de l’interdiction de l’importation de certains produits comme «chips potato» ou la mayonnaise, mais les importateurs se trouvent actuellement contraints de débourser des sommes colossales pour le paiement des surestaries ou les indemnités que les affréteurs doivent payer aux propriétaires des navires.

Des navires transportant des cargaisons de produits divers et en particulier alimentaires sont en effet contraints de rester en rade depuis plus de dix jours dans plusieurs ports en attendant d’accéder aux quais pour débarquer leurs chargements. Les frais supplémentaires pour chaque bateau en séjour prolongé, ce qu’on appelle les surestaries, varient en moyenne entre 3.000 et 5.000 dollars par jour.

Les importateurs sont actuellement dans l’impasse totale. «Les instructions du ministère du Commerce sont claires. Aucune cargaison ne va débarquer sur les quais», précise une source bien informée. Les opérateurs du commerce extérieur ne désespèrent pas pour autant. Ils s’agitent ces derniers jours dans tous les sens pour sauver leurs cargaisons.

Pour ces importateurs, le salut viendra sûrement du Premier ministre qui est le seul habilité à libérer les cargaisons bloquées dans les ports. Ils espèrent une volte-face du gouvernement qui a déjà fait il y a quelques jours marche arrière en assouplissant sa démarche vis-à-vis des concessionnaires automobiles. Un scénario qui semble fort probable vu que le ministère a revu et corrigé récemment sa «blacklist» en autorisant l’importation des fruits exotiques (bananes, kiwis, ananas, avocats…).

VERS L’INSTAURATION DE QUOTAS D’IMPORTATION SELON LES BESOINS

L’interdiction totale de l’importation des 24 produits décidée par le ministère de Commerce reste une mesure provisoire qui devra être remplacée prochainement par l’instauration des quotas d’importation ou licences d’importation pour la limitation en volume ou en valeur, à l’importation, de biens et de services.

«Le projet de loi sur les licences d’importation a été élaboré par le ministère du Commerce», affirme une source autorisée. La nouvelle réglementation sera mise en vigueur dès son approbation par l’Assemblée populaire nationale. Les économistes s’accordent sur le fait qu’il y a péril en la demeure vu que la balance commerciale a enregistré durant les quatre premiers mois de l’année en cours un déficit de 4,32 milliards de dollars, selon le Centre national de l’informatique et des statistiques des douanes algériennes.

Un président d’une chambre du commerce et d’industrie estime que le gouvernement va opter pour les quotas d’importation qui seront accordés au goutte-à-goutte par une commission ad hoc après étude au cas par cas des dossiers des importateurs. La future loi sur les licences d’importation s’inspire du modèle français.

Elle devra être calquée sur la réglementation française. Les quotas d’importation sont ouverts par arrêté pris en Conseil des ministres sur proposition du ministre du Commerce après avis de la commission concernée. Une commission spéciale sera chargée d’octroyer les licences d’importation après étude des demandes en prenant en considération quatre critères : le niveau de la production locale estimée pour l’année en cours, les besoins des consommateurs, les contingents susceptibles d’être accordés et la répartition des quotas entre les opérateurs.

Des quotas d’importation seront mis en place pour chaque importateur et une direction du ministère du Commerce sera chargée du suivi de la délivrance des licences. «Des propositions ont été faites par des opérateurs économiques au ministère du Commerce pour accorder les licences d’importations aux producteurs nationaux dans le but de protéger la production locale et éviter que le marché soit inondé avec des produits de qualité médiocre.

Les producteurs de canalisations en PRV ou système de canalisations en fibre de verre ont été parmi les premiers à avoir contacté le ministère du Commerce pour réclamer des licences d’importation afin de couvrir les besoins du marché local estimé à 30%. Ils ont présenté une argumentation solide pour justifier leur démarche», affirment nos sources. Il faut avouer que certains produits interdits à l’importation constituent non seulement une menace réelle sur le produit local mais en outre comportent de graves risques sur la santé des consommateurs à l’exemple des cosmétiques chinois vendus à des prix défiant toute concurrence dans les marchés populaires.