Une nouvelle qui fait froid au dos : pas de sortie de crise en vue pour l’Algérie

Une nouvelle qui fait froid au dos : pas de sortie de crise en vue pour l’Algérie

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié, ce jeudi 11 août, son rapport mensuel sur la situation du marché pétrolier et ses perspectives. Il en ressort une baisse de la demande prévue en 2017 à 1,2 million de barils par jour (bpj), contre 1,4 million de bpj en 2016, selon les dernières estimations de l’AIE. En juillet dernier, l’offre mondiale de brut a augmenté de 800 000 bpj, soutenue à la fois par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et par les pays producteurs non-Opep, indique la même source.

Dans le même temps, l’agence estime tout de même qu’il n’y aura « pas de surabondance de l’offre durant la deuxième moitié de l’année » en cours. La production mondiale devrait reculer de 1 million de bpj entre juillet et septembre, estime l’AIE. Cela dit, la même institution et des experts pétroliers ont rapidement tempéré leur optimisme, indiquant que les prix du baril resteront « sous pression » en 2017, à cause d’une hausse prévue de la production mondiale et d’une demande encore trop molle pour soutenir les cours.



Une situation qui n’arrange aucunement l’Algérie. Une mauvaise nouvelle qui vient s’ajouter à une série d’informations négatives. Le pays fait face à une crise multiforme. Que ce soit sur le plan social, politique ou économique, les mauvaises nouvelles s’enchaînent et reflètent une situation qui se détériore. Malheureusement, les perspectives de sortie de crise sont limitées. Au contraire, le pays va au-devant d’une situation particulièrement complexe à partir de 2017, notamment sur le plan budgétaire.

Les rapports alarmistes s’empilent

C’est un fait assez marquant pour être relevé : la Gendarmerie nationale s’inquiète, dans un rapport publié récemment, de la « situation sociale préoccupante ». À plusieurs reprises, ce corps des forces de sécurité rappelle les « foyers de tensions » et les « contestations à caractère social », citant le « revêtement des routes », « l’alimentation en eau potable », le « raccordement au réseau du gaz et de l’électricité et la distribution des logements sociaux » comme causes principales.

Des éléments qui sont clairement du ressort des pouvoirs publics et de la politique socio-économique du gouvernement. Or, avec la crise, l’argent manque. Et l’État ne pourra pas dégager les sommes nécessaires pour répondre aux nombreuses attentes exprimées par les citoyens. Les revendications risquent d’augmenter dans les prochains mois.

Les institutions de Bretton Woods s’inquiètent « poliment »

De leur côté, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) évoquent les difficultés qui attendent l’Algérie dans les mois et années à venir. Le chef de mission du FMI en Algérie, Jean-François Dauphin, a mis avant cinq grandes recommandations à l’Algérie pour « doper les perspectives de croissance ».

Pour la énième fois, le FMI distille des conseils au gouvernement algérien. Des suggestions qui s’imposent comme des évidences depuis des années. Mais le fait que le FMI répète sans cesse les mêmes choses témoigne du fait que les réformes entreprises ces dernières années sont, au mieux, insuffisantes. En réalité, aucune réforme sérieuse n’a été engagée.

De plus, même en admettant que des réformes sérieuses et profondes soient entreprises dès la prochaine Loi de finances (pour 2017), il faudra attendre plusieurs années pour récolter les fruits d’une nouvelle politique. Il y a pourtant urgence à réagir, tant que l’Algérie dispose d’un matelas financier relativement conséquent.

Les réserves de change fondent plus vite que prévu

Or, ce matelas rétréci à vue d’œil. De son côté, la Banque mondiale a récemment émis des projections quant à l’évolution des réserves de change du pays. De 194 milliards de dollars en 2013, elles devraient atteindre 108 milliards de dollars à la fin de l’année en cours, selon les estimations de la Banque mondiale.

Cela dit, les réserves de change devraient sérieusement plonger dans les prochains mois, à mesure que les termes de l’échange se dégradent pour l’Algérie : le pays ne disposerait plus que de 60 milliards de dollars à l’horizon 2018. Ceci révèle une accélération de la fonte et une sollicitation accrue de ces précieuses réserves.

Aucune dynamique sérieuse de réformes

Pour la première fois depuis plusieurs années, le gouvernement a pris des mesures intéressantes dans la Loi de finances 2016. C’est le cas de la hausse des prix de l’énergie (carburants, électricité, gaz). Cette décision a rapidement porté ses fruits avec une baisse de la consommation de carburants. La seconde réside dans la tentative de redynamiser les marchés de capitaux, à travers le lancement d’un emprunt obligataire, bien que cette dernière soit un échec en ce qui concerne l’objectif initial de récolter les fonds de l’économie informelle.

Cela dit, le gouvernement ne va pas assez loin, selon la majorité des experts. Sans doute tétanisé par la perspective de prendre des mesures impopulaires et potentiellement difficiles à faire passer d’un point de vue social, les dirigeants se contentent, pour l’instant d’apporter des modifications marginales à la politique économique (et sociale) du pays.

C’est notamment le cas du ministère de l’Industrie. La « nouvelle » loi sur l’investissement, dont les textes d’applications sont prévus pour la fin de l’année au plus tôt, se limite à des changements de forme, mais pas de fond. Des mesures cosmétiques consistant à déplacer une réglementation controversée d’un texte à un autre, sans y changer la moindre virgule.

Pour preuve, aucun journal spécialisé sérieux ne fait état de réformes ambitieuses ou de dynamique de changement dans le paysage économique algérien. Même l’ambassadeur d’Algérie aux États-Unis, Madjid Bougherra ne l’a pas évoqué dans son long entretien avec le média Al Monitor, consacré à la relance des relations économiques entre les deux pays. C’est dire le crédit porté à ce type de texte.

 Le péril budgétaire

En fin de compte, le principal défi de l’Algérie consiste à rééquilibrer son budget et sa balance commerciale. Une tâche titanesque, tant les déficits sont colossaux : un trou de 30 milliards de dollars dans le budget de 2016 et une balance commerciale déficitaire de près de 26 milliards de dollars en 2015.

Pire, les rentrées fiscales sont amenées à s’amenuiser d’ici l’année prochaine. Comme une bombe à retardement, les impôts des sociétés notamment seront réduits avec l’impact de la crise sur leur activité. Etant donné que l’État perçoit les revenus fiscaux avec un décalage d’un an, les finances publiques n’ont pas encore ressenti le choc. Mais les impôts de 2016, perçus en 2017, refléteront un sérieux ralentissement de l’activité.