C’est avec presque deux heures de retard que le président français François Hollande a entamé sa conférence de presse avant-hier
à l’hôtel Aurassi à Alger. Motif ? ‘Un entretien en tête-à-tête de deux heures avec le président Bouteflika », a-t-il expliqué au parterre des journalistes de la presse algérienne et française.
Les deux chefs d’Etat ont brassé, au cours de leurs discussions, dira Hollande, de nombreux dossiers bilatéraux, principalement la coopération économique marquée par une expansion des investissements français vers de nouveaux segments, ainsi que les questions internationales qui interpellent les deux pays, notamment la situation au Mali, en Libye et la menace terroriste.
Cette menace qui « s’est illustrée aujourd’hui par le double attentat mené par Boko Haram à N’djamena au Tchad (NDLR : faisant au moins 27 morts et une centaine de blessés) », a déploré le chef d’Etat français.
D’ailleurs, c’est sur ce chapitre que le président tentera de donner des éclairages quant à la mort annoncée du terroriste algérien Mokhtar Belmokhtar en Libye. Le gouvernement provisoire libyen, basé à Tobrouk, a annoncé dimanche soir l’élimination du chef de la phalange Al mourabitoun suite à des frappes aériennes américaines à Adjdabiya dans l’est de la Libye.
Bien qu’il expliquât que les autorités françaises étaient au courant de l’opération américaine en Libye, il ne put néanmoins confirmer la mort de l’homme le plus recherché de la région du Sahel.
« Je ne peux pas la confirmer (la mort) mais nous savions par nos propres services que Belmokhtar était en Libye », a-t- il lancé, ajoutant qu’ »il y a une très grande probabilité que Belmokhtar ait été tué ». Il a précisé que les services français se basent sur un faisceau d’informations concordantes qui n’excluraient pas son élimination. La lutte antiterroriste constitue l’un des dossiers chauds au menu de la coopération entre Alger et Paris.
François Hollande rappellera alors l’assistance fournie par l’Algérie à la France dans ses opérations au Mali contre les groupes terroristes, tout comme l’engagement diplomatique algérien dans le règlement du conflit entre les mouvements rebelles touaregs et l’armée malienne ponctué par la signature d’un accord de paix.
« La sécurité, c’est la lutte contre le terrorisme, et je veux aussi souligner le combat commun contre cet ennemi terrible, implacable, auquel nous avons porté des coups et encore récemment, ces dernières heures », a souligné le président Hollande, qui a exprimé à l’occasion sa « gratitude envers les autorités algériennes » pour leur action après l’enlèvement et l’assassinat du Français Hervé Gourdel, en septembre 2014 à Tikjda en Kabylie.
Pour Hollande, la coopération entre les deux pays ne se limite pas au chapitre sécuritaire mais s’étendra davantage au segment économique.
« Par rapport à ce que nous vivons, la sécurité dans le Sahel, la Libye, nous avons besoin d’avoir un travail en commun », a-t-il insisté évoquant le « travail économique » entre les deux pays. « Vous savez combien nos populations sont liées.
L’histoire doit nous permettre d’aller beaucoup plus loin dans les relations », a-t-il expliqué, estimant que « nous avons déjà réalisé beaucoup ». Interrogé sur l’éventuelle implantation du constructeur d’automobiles « Peugeot » dans le marché du montage des véhicules, à l’image de son concurrent « Renault » qui s’est implanté à Oran, dans l’Ouest algérien, le président français annoncera que le constructeur devrait lui aussi s’installer en Algérie prochainement.
Il dira également qu’ »un travail est en train de se faire » pour que Total engage des investissements dans l’exploitation du gaz de schiste. Il ne manquera pas, dès lors, de signaler que la relation entre l’Algérie et la France obéit à une « amitié exigeante ». Il dira qu’ »avec le président Bouteflika, « nous avons établi une relation d’extrême confiance. Ses conseils, sa vision du monde sont particulièrement précieux ».
Le leader socialiste soulignera, par ailleurs, que le président Bouteflika lui a donné une impression « de grande maîtrise intellectuelle », en réponse à une question sur l’état de santé du président algérien. Il est « rare de rencontrer un chef d’Etat qui a une telle alacrité », a-t-il ajouté.
« Vous m’interrogez sur sa santé, je ne suis pas médecin et je ne viens pas comme médecin rencontrer un chef d’État. Ce que je peux vous dire, c’est que la qualité de la discussion que nous avions eu pendant près de deux heures était particulièrement intense et élevée », a expliqué le président français.
Il ajoutera : « Bouteflika, je vous confirme qu’il ne peut pas se déplacer mais je le savais déjà », faisant remarquer que son hôte avait « une capacité rare de jugement ».
Pour Hollande, le chef d’Etat algérien a « toutes les capacités et l’a montré » pour analyser les grands dossiers de l’heure. « Je ne parle pas de ce qu’il peut faire pour l’Algérie, mais pour apporter sa sagesse et son jugement pour régler les crises dans le monde », a-t-il encore dit.
Le chef d’Etat français effectuait une « visite d’amitié » à Alger, la seconde depuis son accession à l’Elysée en 2012. A en croire le président, cette deuxième visite permettrait également de fluidifier les relations franco-algériennes. « On simplifie les choses. Chaque visite de chef d’Etat, de chef de gouvernement, de chef de parlement, permet de faire en sorte que ce soit plus simple », a-t-il précisé.
La courte visite algéroise de François Hollande était essentiellement consacrée aux partenariats économiques et au développement des relations d’affaires entre les deux pays.