Réaction n «Il donne le droit aux gens de s’en prendre à nous », s’alarmait Ahmad Shedeed, un musulman américain, qui a réagi aux propos du candidat Donald Trump, contre ses coreligionnaires, qui viennent alimenter un racisme de plus en plus pressant aux États-Unis.
«Donald Trump ressemble plus au leader d’une foule prête au lynchage que d’un grand pays comme le nôtre», s’est désolé Nihad Awad, directeur du Comité de relations américano-islamiques (CAIR). Son idée de fermer les frontières US aux musulmans étrangers décriée jusque dans son propre camp, fait suite à d’autres coups de sang du républicain contre la religion musulmane. Fin novembre, il avait ainsi affirmé que des musulmans aux États-Unis et dans le monde avaient fêté en 2001 les attentats du 11 septembre. «C’était de la torture, nous étions effrayés, en larmes» après ces propos, se souvient Ahmad Shedeed, directeur du centre islamique de Jersey City. «Si Trump avait été actif à l’époque du 11 Septembre et avait tenu des propos pareils, je suis sûr que beaucoup d’entre nous auraient souffert», poursuit cet homme arrivé d’Egypte en 1980. Quelques heures avant que M. Trump ne fasse sa déclaration qui semble directement enfreindre la Constitution des États-Unis, des responsables de la communauté musulmane du New Jersey avaient rencontré des procureurs pour leur demander de prendre au sérieux les accusations de crimes racistes contre des musulmans. Une série d’événements, des crachats contre des femmes voilées, un chauffeur de taxi abattu par balle dans le dos, une tête de porc retrouvée devant une mosquée de Philadelphie, ont déclenché un véritable sentiment de peur. Najiba Saleh, une mère de quatre enfants installée aux États-Unis depuis trois décennies, explique se sentir en danger pour la première fois de sa vie. «Quand (les enfants) quittent la maison, je me demande : ‘Et si quelqu’un passe en voiture et les voit et les prend pour cible’», confie cette habitante du New Jersey. Ahmad Shedeed s’inquiète de ce sentiment de peur et du sort des 2,75 millions de musulmans aux États-Unis. Ce chiffre donné par le Pew Research Center en 2011 est inférieur aux 6 à 12 millions avancés par des membres de la communauté. «Je demande (à Donald Trump), je le supplie de mettre fin à toutes ces accusations. Considérez la communauté musulmane comme une composante de la mosaïque américaine, nous faisons partie des États-Unis», souligne M. Shedeed. Plusieurs autres voix se sont également élevées pour mettre en garde contre un sentiment antimusulman à travers le pays. Le Comité de relations américano-islamiques (CAIR) affirme avoir documenté une série d’abus, d’actes de vandalisme et de discriminations survenus le mois dernier. Les musulmans représentent le troisième groupe d’immigrés légaux aux USA, après les chrétiens (61%) et les non-affiliés (14%). Ils représentaient 5% des immigrés légaux en 1992 pour 10% en 2012. La plupart (81%) des musulmans qui vivent aux Etats-Unis ont la citoyenneté américaine, alors que 70% d’entre eux ne sont pas nés aux Etats-Unis. Il s’agit d’une part importante lorsqu’on la compare à la population immigrée dans son ensemble : 47% des immigrés qui ne sont pas nés aux Etats-Unis ont obtenu la citoyenneté.
R. I. / Agences