Les critiques se sont abattues sur le je de l’Espagne au début du Mondial, les blessures se sont accumulées, mais Xavi et Iniesta, architecte et ingénieur de la «Roja», ont serré les dents avec une seule obsession, faire vivre ce jeu de passes, ce fameux «toque», leur signature.
Il fallait entendre Luis Aragones, sélectionneur champion d’Europe en 2008 avec l’Espagne, avouer son pessimisme avant le 8e de finale contre le Portugal: «La vertu de l’Espagne est fondamentalement la possession du ballon.
Mais si le Portugal sait le lui subtiliser, je crois qu’il va avoir des options pour gagner». Mais après la victoire sur la Selecçao (1-0), le «sage d’Hortaleza» lançait: «Nous avons enfin vu l’Espagne de toujours». Aragones avait surtout vu un but de Villa après un très bel enchaînement Xavi-Iniesta.
Dans ce match, les deux créateurs de poche du FC Barcelone (1,70 m tous les deux) ont montré une constance incroyable dans leurs ouvertures millimétrées pour des partenaires pas toujours inspirés, à l’image de Torres complètement à côté de la plaque.
Ce qui a forcé le duo à privilégier un peu trop le flanc gauche où évolue un Villa plus en jambes. Travailleurs infatigables de l’ombre, éclairés à la lumière du sacre de l’Euro-2008, les deux chefs d’orchestre ont toujours cherché à faire vivre ce «toque», ce jeu en mouvement, et n’ont jamais cherché à «balancer» quand ça ne venait pas.
Aragones avait peur que le Portugal ne subtilise le ballon? Encore aurait-il fallu que Xavi le perde! Les Portugais ont vite compris que les parallèles dressés avec Johan Cruyff ou Pep Gardiola joueurs avaient toujours cours pour Xavi.
Cristiano Ronaldo s’est également fait dérober les ballons dans les pieds par ce diable d’homme, qui les a ensuite livrés proprement dans les intervalles pour ses partenaires. «Régularité et placement idéal» le félicitait cette saison Gardiola, son entraîneur au Barça.
Ces mots sonnent toujours juste. Xavi, comme toute son équipe, n’a pas encore retrouvé le niveau de l’Euro-2008, dont il avait été désigné meilleur joueur, mais il revient fort, en dépit d’une blessure à un mollet en fin de saison.
Selon les statistiques de la FIFA, Xavi a réalisé depuis le début de ce Mondial 368 passes avec un taux de réussite de 80%. C’est vertigineux! Par comparaison, l’Argentin Leo Messi en est à 267 avec une réussite de 73% et l’Allemand Mesut Özil à 179 avec une réussite de 71%.
Iniesta refait également surface après avoir vécu une saison difficile avec de nombreux passages à l’infirmerie.
Le décompte fait peur: déchirure à la cuisse droite mi-avril, rechute en préparation, puis coup reçu contre la Suisse!Ménagé contre le Honduras, Iniesta s’est enfin signalé contre le Chili pour le dernier match de poule en marquant un des deux buts de la victoire. Il était temps. Torres n’étant que l’ombre de lui-même, le sélectionneur Vicente Del Bosque pourrait être tenté de jouer la carte Fernando Llorente, auteur d’une entrée remarquée contre le Portugal.
L’association possible du jeu en profondeur de Llorente et des passes guidées par satellite du tandem Xavi-Iniesta fait déjà saliver.