Yacine Djebbour, créateur de JawlaWeb: « Le web algérien est très violent, on n’y voit pas assez de beauté »

Yacine Djebbour, créateur de JawlaWeb: « Le web algérien est très violent, on n’y voit pas assez de beauté »

Et si on arrêtait de regarder des vidéos de bagarre, de chutes, d’accidents, etc. ? Fini la violence, place aux belles choses ! C’est de cette idée qu’est né « Jawla web »: une série hebdomadaire de « balades sur le web », sur Facebook, à la rencontre des sports extrêmes, des jeux sur Android ou encore de l’art urbain…

« Je voulais montrer qu’une autre consommation des vidéos en ligne est possible », explique Yacine Djebbour, initiateur du projet et fondateur de la boîte de communication Say Production.

Chaque vidéo dure environ cinq minutes qui correspondent à neuf à dix séquences d’une durée de 30 à 35 secondes par sujet. Cela permet de ne pas faire du zapping, sans être non plus trop long. Voilà pour la forme.

Pour le fond, Internet n’a pas de frontières, pourquoi « Jawla web » en aurait? C’est tellement plus enrichissant d’ouvrir au maximum les contenus. Quant à la langue, elle correspond à notre parler quotidien: un mixte d’arabe, de mots français et anglais ; un langage simple compréhensible par tous.

Comment se fabrique un numéro de « Jawla web »?

Tout commence par un travail de recherche et d’écriture avant de m’emparer de la souris pour le montage. Les thèmes sont choisis en fonction de l’actualité numérique, comme la sortie du dernier Star Wars à Alger, mais aussi des tendances incontournables tels que les appareils connectés, les smartphones de 2016, les podcasters algériens, etc.

A 30 ans, ce touche-à-tout de l’image et boulimique du web, a donc rassemblé toutes ses compétences, réfléchi, écrit, produit et dévoilé le 10 décembre dernier, le premier épisode. Depuis, chaque jeudi à 19 heures, les fans de la page Facebook et fidèles de la chaîne découvre une nouvelle vidéo. Rencontre avec son créateur.

« Jawla web » c’est un personnage en pixels, des vidéos courtes avec des contenus du monde entier accompagnés par une voix-off en derja, pourquoi un tel cocktail?

Je suis d’abord un enfant de la télévision, puis j’ai grandi dans l’univers du jeu vidéo. Le personnage qui m’a le plus marqué c’est Mario. L’avatar de Jawla web est donc inspiré de cette histoire: il est un mélange entre le « retro-gaming » et le « pixel-art ».

Chaque épisode nécessite trois à cinq jours de travail entre l’écriture, le montage, l’enregistrement, le mixage et l’export. Toujours avec un souci qualitatif, à la fois au niveau du contenu, sans vulgarité ni violence, mais aussi technique : les extraits vidéos sont en haute définition et les enregistrements sonores sont réalisés en studio. Mais dans un avenir proche, on va acquérir notre propre matériel afin de tout produire à domicile et ainsi aller plus vite. Le but est de s’améliorer au fur et à mesure.

Pourquoi avoir choisi Facebook pour la diffusion des vidéos?

Facebook permet de toucher plus d’internautes que sur Youtube car la vidéo se lit directement sur le mur et se partage facilement. Dorénavant, c’est la publication instantanée qui est privilégiée à l’image de l’application Snapchat qui a déjà pris sa place à l’étranger et ne va pas tarder à la prendre en Algérie. Après un mois d’existence, nous comptons près de 2000 fans sur la page et les vidéos les plus regardées ont atteint 27000 vues.

Facebook permet aussi de développer l’aspect communautaire: entre chaque épisode, on publie des vidéos en lien avec le thème mais aussi des gifs, des photographies, des bandes annonces, le « meilleur du web », etc. toujours accompagnés d’une petite phrase ou questions pour nos fans.

A l’approche du jeudi, on sollicite aussi les internautes pour qu’ils devinent le thème à venir grâce à des indices. Je suis un grand adepte de gifs donc j’en partage très souvent : cela va du pas de danse à un saut d’éléphant sur un trampoline en passant par un chat vampire ! Outre, la page Facebook, on a aussi notre chaine Youtube.

Par la suite, on aimerait faire de « Jawla Web » un site sur la culture web et le numérique. Pour l’instant, le site est en construction et sera lancé une fois que l’on aura stabilisé la page Facebook, d’ici deux à trois mois environ.

Comment réussir à pérenniser le projet?

Pour exister et continuer à exister, les contenus sur le Net doivent être suivis et soutenus par le sponsoring des marques. C’est le cas pour Jawla web qui a besoin d’un soutien financier pour se développer.

Pour l’instant, j’assume seul le coût de production, qui est de 65.000 DA par épisode, en faisant tout moi-même mais c’est un modèle qui ne peut être que transitoire.

Une fois que Jawla web aura consolidé ses bases, on essayera de trouver un sponsor pour nous accompagner et continuer à fabriquer un produit de qualité. D’autant que l’environnement est aujourd’hui plus propice à accueillir un tel modèle. Les marques algériennes sont déjà sur Internet et doivent publier du contenu pour leurs clients.

On a passé ces dernières années à produire du texte et de l’image. Les prochaines années ce sera de la vidéo et demain de la réalité augmentée. L’Algérie n’y échappera pas.