« Yir zwadj (le mauvais mariage) » est le titre d’un sketch interprété au Théâtre régional Kateb Yacine de Tizi Ouzou par un quatuor de comédiens : Hillal Berkane, Dalila Sider, Khaled Boukhloufa et Lila Salmi.
La question traitant du problème du couple, ou tout simplement de la famille en Algérie, est sans doute aussi vieille que la société algérienne. Il n’en demeure pas moins cependant que la nature du problème change avec l’évolution du couple ou de la famille.
Aussi, pour être vraiment tout près de la question, ce quatuor de comédiens et non moins scénariste, metteur en scène et producteur, a situé cette année 20I5 comme élément temporel quant à cette relation époux – épouse. L’un et l’autre sont déçus par leur vie de couple puisque l’un accuse l’autre de faire la mauvaise moitié du couple.
En effet, le mari accuse son épouse de n’avoir de motivations que « pour des sorties mondaines et répétées » ainsi que pour la recherche incessante de l’esthétisme artificiel, d’ailleurs qu’elle ne retrouve jamais puisqu’il est factice alors que le véritable intérêt de leur couple se trouve dans le respect « des valeurs culturelles et coutumières anciennes ».
L’épouse accuse, de son côté, ce mari rigide, égoïste et peu enclin à accepter les faveurs de la modernité à son épouse telles que les sorties, les soirées musicales, les dîners au restaurant, etc. Dans cette crise identitaire aiguë, l’un trouve chez l’autre même des défauts physiques.
En effet, Monsieur trouve que Madame à la chevelure d’artichaut, un visage d’une laideur jamais égalée, etc. De son côté, Madame trouve que Monsieur a des bourrelets aux hanches, une bedaine excessivement grande et laide, une calvitie dégoûtante, etc.
Dans ce dialogue entretenu par Hillal Berkane et Dalila Sider, le public, nombreux et composé surtout de mères de famille, en a ri jusqu’aux larmes. La suite de l’histoire se traduit par l’aveu de l’épouse quant à son dégoût envers sa belle-mère qui « n’arrête pas de lui donner des ordres ».
C’est un mot de plus pour le mari qui ne peut accepter que le statut de sa mère soit remis en cause. Des épouses, on peut en avoir autant qu’on veut, mais une mère, on n’en a qu’une seule.
De cette ligne « rouge » dépassée, il n’est désormais question que de la répudiation de cette épouse qui « ne connaît aucune limite ». L’acte 2 du sketch montre le père de cette épouse (Khaled Boukhloufa) qui rentrant à la maison, trouve sa deuxième fille, mariée elle aussi (Lila Salmi), en train de danser au rythme d’une musique diffusée par un appareil stéréo.
Une fois revenu de sa surprise et qu’il demande les raisons de « cette atmosphère indigne », sa fille lui réplique : « Papa, je suis si contente et si gaie car je viens de quitter mon mari. Je l’ai quitté par ce qu’il n’y avait aucune gaîté chez lui. Je suis tellement heureuse d’être à nouveau auprès de toi et dans cette maison où j’ai connu la gaîté ».
Et presque aussitôt, la fille informe son paternel de son désir de se rendre en ville pour acheter des fringues dignes des femmes civilisées, comme « le jean déchiré ». Le paternel manifeste son désarroi envers sa progéniture.
C’est la fin du deuxième acte. Le troisième : son beau-fils (Hillal Berkane » et sa fille aînée (Dalila Sider) arrivent au devant de lui et chacun se plaint des défauts de l’autre. Au même temps, son beau-fils lui manifeste son désir de divorcer. Le beau-père tente un arrangement.
Au début, il trouve des réticences chez le beau-fils, mais une proposition d’aide financière finit par convaincre ce gendre de faire des concessions. De son côté, l’épouse fait son mea culpa et promet de prendre soin de sa belle-mère. Avant de quitter la scène, l’actrice Dalila Sider lance au public : « veillez à prendre grand soin de vos parents, les parents sont sacrés. »
C’est dans leur loge que nous avons pris directement contact avec ce quatuor de comédiens. Le temps est compté puisque de l’aveu même de Hillal Berkane, la jeune équipe est en plein tournage d’un film qui sera diffusé durant le mois de ramadhan. Notre interlocuteur nous apprendra que lui et ses trois autres camarades s’occupent eux-mêmes de l’écriture des scénarios, de la mise en scène, de la production et de l’interprétation bien entendu.
« Avant, nous nous adressions à d’autres boîtes de production pour financer nos produits artistiques, mais au cours de cette année 20I5, tous les quatre nous avons réussi à mettre sur pied notre propre boîte de production dénommée « Tiro-Production ». S’agissant de leur collaboration, notre interlocuteur a signalé qu’elle remonte à trois ans et leurs produits sont diffusés par la chaîne nationale TV4 et par des supports de communication privés. Des projets futurs ? « Nous en avons ! », répond Hillal Berkane.