L’ancien chef de l’état Liamine Zeroual qui vient de revenir dans l’actualité, après un long moment de silence, est une véritable exception algérienne. L’ancien président de la République qui a reçu un bon nombre de sollicitations insistantes, l’invitant à reprendre les rênes du pays, a toujours gentiment décliné l’offre. Ce qui est inédit dans l’histoire politique de l’Algérie, car jamais une personnalité n’a eu à refuser la plus haute fonction de l’état.
Zeroual assure que sa carrière politique est derrière lui. En effet, celui qui pendant plus de dix ans, ne s’est exprimé qu’une seule fois, en 2013 pour dire : «Le présidentiable ce n’est pas moi, allez voir ailleurs», veut continuer à profiter de sa retraire paisiblement auprès des siens, dans sa ville natale de Batna.
L’ancien officier de l’ANP, qui a été appelé à la rescousse, dés 2009, par d’anciens militants du RND qui déjà à l’époque, voulaient barrer la route à un troisième mandat de Bouteflika, ne veut toujours pas être « le sauveur » comme certains le qualifient. À ces cadres du RND, il répondit à l’époque par un communiqué, dans lequel il disait : « Ma décision annoncée le 11 septembre 1998 d’organiser une élection présidentielle anticipée ne résultait pas d’une manœuvre politique ou d’une pression quelconque, interne ou externe, comme elle n’était pas dictée par l’accumulation de difficultés insurmontables. […] En décidant, en toute liberté, de renoncer définitivement à ma carrière politique, j’ai estimé qu’il était temps que l’alternance se concrétise afin d’assurer un saut qualitatif à nos mœurs politiques et à la pratique de la démocratie, tant était loin de ma conception la notion d’homme providentiel à laquelle je n’ai jamais cru ».
Ali Mebroukine, universitaire et ancien collaborateur du président Liamine Zeroual, explique que « Dans le monde arabe, depuis les indépendances de nos pays, Liamine Zeroual reste l’unique exemple d’autolimitation dans l’exercice du pouvoir suprême », ce qui rajoute à la singularité de l’ancien chef d’état.
Zeroual, que les algériens ont découvert en juillet 1993, le jour de sa nomination, par le Haut-Comité d’Etat (HCE), au ministère de la Défense avait fait vœu d’alternance et de démocratie, et c’est ce qui l’a amené à démissionner ce fameux 11 septembre 1998, selon certains observateurs. Pour Ali Mebroukine, « C’est pour avoir refusé d’être un trois quarts de président ou encore d’être un simple ‘‘président stagiaire’’, que Liamine Zeroual a décidé de mettre un terme à son mandat ».
Enfin, malgré ce profil atypique, certains continuent à voir en Liamine Zeroual, un «messie désigné par l’oracle». On se rappelle des déclarations de l’ancien officier du DRS, Mohamed Chafik Mesbah qui avait dit en mai 2013: «Je ne vois aucun homme aujourd’hui qui se dégage. Aucun ne fait consensus, ni chez les laïcs ni chez les islamistes. Le seul qui ferait consensus, c’est Liamine Zeroual qui aurait pour mission de recoudre un tissu social miné par la corruption.»
Pour les algériens, ce qu’ils retiennent de l’ancien président, c’est ce fameux article 74 de la loi fondamentale qui réfère à limitation des mandats présidentiels et que Zeroual avait instauré. Article de loi, qui fut supprimé de la constitution quelques années plus tard par l’actuel chef de l’état. Une suppression qui a sûrement joué sur le fait que Liamine Zeroual ait toujours entretenu une certaine distance avec son successeur.